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Covid-19 et maladies chroniques : Quand les usagers du système de soins ne peuvent plus y accéder

Dernière mise à jour : 25 nov. 2021





En 2019, la Caisse Nationale d’Assurance-Maladie (CNAM) dénombrait 20 millions de patients atteints d’une maladie chronique en France. Depuis les annonces de confinement prises par le gouvernement le 12 mars dernier, et les mesures de réorganisation du système de soins inhérentes à la gestion de l’épidémie de COVID-19, ce sont donc près d’un Français sur trois qui sont directement ou indirectement impactés dans leur prise en charge quotidienne. Nombre d’entre eux ont fait d’ores et déjà part de leurs inquiétudes, légitimes, quant à leur vulnérabilité et la nécessité d’une continuité de leur suivi médical. Ils décrivent notamment l’angoisse que suscite la propagation du virus, en particulier pour ceux atteints d’une des pathologies dites « à risque », c’est-à-dire qui constituent un facteur potentiellement aggravant en cas de contamination. Au-delà de la vulnérabilité de nombre d’entre eux vis-à-vis de l’infection elle-même, ils sont tous des usagers réguliers du système de soins qu’ils constatent soudainement inaccessible alors que leur maladie est toujours bien présente. Les conséquences de la crise sanitaire sur les malades chroniques sont multiples, parfois inattendues, et très délétères.



Vaccin COVID-19
Covid-19 et maladies chroniques : Quand les usagers du système de soins ne peuvent plus y accéder

En premier lieu, l’annulation d’actes programmés (consultations de suivis, examens de dépistage systématiques ou ciblés, etc…) vient immanquablement perturber le suivi normal de la maladie, voire aggraver le pronostic en retardant la détection de complications. On peut également évoquer le cas d’interventions chirurgicales ayant potentiellement un impact colossal sur la vie des personnes qui en bénéficient (greffe, PMA, etc.) et qui peuvent être difficiles voire impossibles à reprogrammer par la suite. Si la téléconsultation peut-être une part importante de la réponse, elle ne suffira pas à pallier l’ensemble des obstacles que rencontrent déjà certains patients pour accéder au système de soins. Plus encore, la saturation des plateformes de régulation médicale et des services d’urgence et de soins non-programmés font courir un vrai risque aux patients souffrant de maladies chroniques évoluant par poussées ou par crises. L’asthme et le diabète par exemple, qui concernent à eux seuls près de 8 millions de patients en France, peuvent s’accompagner d’épisodes d’exacerbations ou de décompensations aussi fréquents qu’imprévisibles.



Enfin l’accès aux médicaments peut être fragilisé, bien que cela ne semble pas encore être le cas à l’heure actuelle. L’exemple de l’hydroxychloroquine en est une illustration : l’emballement médiatique autour de ce produit, dont l’efficacité demeure par ailleurs encore très incertaine sur les patients atteints du COVID-19, a bien montré comment les fluctuations de la demande, légitimes ou non, peuvent créer des tensions sur l’approvisionnement. Fort heureusement, la simplicité de fabrication de ce médicament par les industriels a permis d’éviter une rupture massive du stock, sans quoi les patients atteints de lupus ou d’autres maladies inflammatoires (notamment rhumatologiques) qui bénéficient quotidiennement de ce traitement, se seraient retrouvés démunis.


La combinaison de ces différents mécanismes risque, du fait de cette crise sanitaire inédite, de détériorer la santé de nombreux patients atteints de pathologies chroniques. Si des leçons seront assurément tirées pour prévenir l’émergence d’une prochaine pandémie, et a minima mieux nous préparer à l’affronter, il faudra aussi répertorier les conséquences de la crise sur les autres usagers usuels du système de soins, et notamment les malades chroniques. Plusieurs solutions sont d’ores et déjà envisagées, voire pour certaines en cours de déploiement (télémédecine, relocalisation de la production de produits de santé, constitution de stocks stratégiques nationaux, délégation de compétence, etc…), mais il est peu probable qu’elles suffisent, en l’état, à faire face à la catastrophe annoncée.


Certes, ses conséquences sur les personnes dont il est ici question ne feront pas les gros titres, mais on peut s’attendre à ce que les chiffres de surmortalité et de surmorbidité des patients chroniques, qui seront publiés dans les mois et années à venir, projetteront un nouveau regard sur la gestion de cette épidémie et sur le choix des priorités.



Par Axelle Ayad, diplômée de l'ESSEC et de Centrale, auteure de Lonely patients, et fondatrice de la start-up "Map-Patho".


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